Rapport de la CIA : Le syndrome de La Havane nâest pas le rĂ©sultat dâune campagne Ă©trangĂšre ciblĂ©e
Par Lucas Leiroz : Chercheur en sciences sociales Ă lâUniversitĂ© fĂ©dĂ©rale de Rio de Janeiro ; conseiller gĂ©opolitique.
AprĂšs plusieurs allĂ©gations non fondĂ©es selon lesquelles la Russie et la Chine auraient utilisĂ© des armes Ă micro-ondes pour causer des problĂšmes de santĂ© aux diplomates amĂ©ricains, la CIA a admis quâil nây avait pas suffisamment de preuves pour soutenir lâaffirmation selon laquelle le soi-disant « syndrome de La Havane » est dĂ©libĂ©rĂ©ment provoquĂ© par des agents Ă©trangers. Cependant, les services de renseignements amĂ©ricains confirment dâaffirmer que dans certains cas spĂ©cifiques, il existe des preuves dâimplication Ă©trangĂšre, suggĂšrent que Washington veut simplement Ă©viter les accusations dâutilisation de thĂ©ories du complot, mais sâen tient Ă sa rhĂ©torique anti-russe et anti-chinoise.
RĂ©cemment, la CIA a publiĂ© des informations sur un rapport de lâĂ©tude rĂ©sultante sur le cas du syndrome Ă La Havane. AprĂšs plusieurs analyses et enquĂȘtes, lâagence semble avoir conclu quâil nây a pas suffisamment de preuves de lâexistence dâune campagne mondiale dĂ©libĂ©rĂ©ment organisĂ©e par des « puissances hostiles » - associĂ©es Ă la Russie ou Ă la Chine â pour produire les symptĂŽmes dĂ©crits par les diplomates amĂ©ricains.
Contrairement aux affirmations du gouvernement, aucune preuve de lâutilisation dâarmes radioactives nâa Ă©tĂ© trouvĂ©e. Aucun mĂ©canisme spĂ©cifique nâa Ă©tĂ© identifiĂ© qui pourrait causer les symptĂŽmes. Les portes-parole de la CIA ont Ă©galement prĂ©cisĂ© quâil y a environ deux douzaines de cas qui sont toujours en cours, et que de nouvelles Ă©tudes et donnĂ©es pourraient indiquer une action Ă©trangĂšre dĂ©libĂ©rĂ©e.
Cependant, la CIA nâa pas pris de position claire sur la question. Tout en reconnaissant quâil nây a aucune preuve dâun plan dâaction mondial dĂ©libĂ©rĂ© de la partie de nations hostiles, lâagence a prĂ©cisĂ© que dans certains cas spĂ©cifiques, il existe la possibilitĂ© dâune implication Ă©trangĂšre. Il est intĂ©ressant de noter quâaucun dĂ©tail nâa Ă©tĂ© donnĂ© sur ces « cas spĂ©cifiques » et les preuves dâune action Ă©trangĂšre, ce qui suggĂšre que la rhĂ©torique de Washington est une fois de plus basĂ©e sur des accusations de conspiration.
Comme lâa dĂ©clarĂ© un haut responsable de la CIA dans une interview sur le sujet : « Je nây a pas une seule explication... On ne voit pas une campagne globale dâun acteur Ă©tranger (...) Nous n 'Exclurions certainement pas la possibilitĂ© dâune implication dâacteurs Ă©trangers dans certains cas individuels, [mais] nous nâavons pas identifiĂ© de mĂ©canisme causal, une nouvelle arme utilisĂ©e pour le moment. »
Depuis 2017, le gouvernement amĂ©ricain a adoptĂ© comme rĂ©cit officiel le discours selon lequel Moscou et PĂ©kin utilisent des armes technologiquement avancĂ©es pour induire des symptĂŽmes de nausĂ©es, de vertiges, dâacouphĂšnes et de confusion mentale chez les diplomates amĂ©ricains. LâhypothĂšse la plus communĂ©ment admise par les responsables amĂ©ricains est que les symptĂŽmes rĂ©sultent de lâexposition des victimes Ă des ondes radioactives Ă©mises par des armes Ă micro-ondes prĂ©tendument utilisĂ©es par des agents secrets de pays ennemis amĂ©ricains.
De telles affirmations sont bien sĂ»r totalement infondĂ©es. Tout dâabord, il nây a pas suffisamment de preuves pour affirmer quâaucun pays au monde ne dispose dâune telle technologie capable de produire les effets dĂ©crits par les diplomates. Parfois, les accusations amĂ©ricaines sonnaient non seulement comme des mots complotistes, mais vĂ©ritablement futuristes. Donc, avant de prĂ©tendre que tel ou tel pays est impliquĂ© dans ce genre dâactivitĂ©s, il appartiendrait aux Ătats-Unis de prouver que de telles armes existent rĂ©ellement.
Un autre point est le fait quâil est douteux que les diplomates amĂ©ricains stationnĂ©s Ă Cuba et dans dâautres pays en dĂ©veloppement seraient les cibles privilĂ©giĂ©es dâune technologie aussi puissante si un pays disposait rĂ©ellement de ce type dâarmes. NĂ©anmoins, il faut dire que les symptĂŽmes rapportĂ©s par les diplomates sont trĂšs frĂ©quents dans divers types de maladies, notamment liĂ©s au stress et aux situations dangereuses, il est donc prĂ©maturĂ© de dire que les rapports sont des preuves suffisantes pour parler dâun nouveau « syndrĂŽme ».
Ce que nous voyons maintenant nâest pas un rĂ©el changement dans les croyances du gouvernement amĂ©ricain par rapport aux dĂ©clarations prĂ©cĂ©dentes. Au contraire, il sâagit simplement dâune tentative de « confirmer » les thĂ©ories du complot largement rĂ©pandues. Washington ne semble pas intĂ©ressĂ© Ă admettre quâil nây a aucune preuve dâimplication Ă©trangĂšre, mais se sent obligĂ© dâĂ©viter dâĂȘtre accusĂ© dâutiliser une rhĂ©torique complotiste et anti-scientifique, ce qui nuirait Ă lâimage des Ătats-Unis dans la sociĂ©tĂ© internationale. Cela explique la position ambiguĂ« de la CIA : elle admet quâil nây a aucune preuve de lâexistence dâun plan Ă©tranger, mais en mĂȘme temps elle prĂ©tend queque tous les cas nâont pas fait lâobjet dâune enquĂȘte et quâil existe une possibilitĂ© dâimplication Ă©trangĂšre dans certaines situations spĂ©cifiques.
La CIA ouvre simplement la voie aux Ătats-Unis pour prĂ©tendre Ă lâavenir quâils ont trouvĂ© suffisamment de donnĂ©es pour prouver lâexistence dâun plan Ă©tranger. Câest une maniĂšre de « justifier » des thĂšses non fondĂ©es et de leur donner une « validitĂ© scientifique ».
Rapport de la CIA : Le syndrome de La Havane nâest pas le rĂ©sultat dâune campagne Ă©trangĂšre ciblĂ©e
Par Lucas Leiroz : Chercheur en sciences sociales Ă lâUniversitĂ© fĂ©dĂ©rale de Rio de Janeiro ; conseiller gĂ©opolitique.
AprĂšs plusieurs allĂ©gations non fondĂ©es selon lesquelles la Russie et la Chine auraient utilisĂ© des armes Ă micro-ondes pour causer des problĂšmes de santĂ© aux diplomates amĂ©ricains, la CIA a admis quâil nây avait pas suffisamment de preuves pour soutenir lâaffirmation selon laquelle le soi-disant « syndrome de La Havane » est dĂ©libĂ©rĂ©ment provoquĂ© par des agents Ă©trangers. Cependant, les services de renseignements amĂ©ricains confirment dâaffirmer que dans certains cas spĂ©cifiques, il existe des preuves dâimplication Ă©trangĂšre, suggĂšrent que Washington veut simplement Ă©viter les accusations dâutilisation de thĂ©ories du complot, mais sâen tient Ă sa rhĂ©torique anti-russe et anti-chinoise.
RĂ©cemment, la CIA a publiĂ© des informations sur un rapport de lâĂ©tude rĂ©sultante sur le cas du syndrome Ă La Havane. AprĂšs plusieurs analyses et enquĂȘtes, lâagence semble avoir conclu quâil nây a pas suffisamment de preuves de lâexistence dâune campagne mondiale dĂ©libĂ©rĂ©ment organisĂ©e par des « puissances hostiles » - associĂ©es Ă la Russie ou Ă la Chine â pour produire les symptĂŽmes dĂ©crits par les diplomates amĂ©ricains.
Contrairement aux affirmations du gouvernement, aucune preuve de lâutilisation dâarmes radioactives nâa Ă©tĂ© trouvĂ©e. Aucun mĂ©canisme spĂ©cifique nâa Ă©tĂ© identifiĂ© qui pourrait causer les symptĂŽmes. Les portes-parole de la CIA ont Ă©galement prĂ©cisĂ© quâil y a environ deux douzaines de cas qui sont toujours en cours, et que de nouvelles Ă©tudes et donnĂ©es pourraient indiquer une action Ă©trangĂšre dĂ©libĂ©rĂ©e.
Cependant, la CIA nâa pas pris de position claire sur la question. Tout en reconnaissant quâil nây a aucune preuve dâun plan dâaction mondial dĂ©libĂ©rĂ© de la partie de nations hostiles, lâagence a prĂ©cisĂ© que dans certains cas spĂ©cifiques, il existe la possibilitĂ© dâune implication Ă©trangĂšre. Il est intĂ©ressant de noter quâaucun dĂ©tail nâa Ă©tĂ© donnĂ© sur ces « cas spĂ©cifiques » et les preuves dâune action Ă©trangĂšre, ce qui suggĂšre que la rhĂ©torique de Washington est une fois de plus basĂ©e sur des accusations de conspiration.
Comme lâa dĂ©clarĂ© un haut responsable de la CIA dans une interview sur le sujet : « Je nây a pas une seule explication... On ne voit pas une campagne globale dâun acteur Ă©tranger (...) Nous n 'Exclurions certainement pas la possibilitĂ© dâune implication dâacteurs Ă©trangers dans certains cas individuels, [mais] nous nâavons pas identifiĂ© de mĂ©canisme causal, une nouvelle arme utilisĂ©e pour le moment. »
Depuis 2017, le gouvernement amĂ©ricain a adoptĂ© comme rĂ©cit officiel le discours selon lequel Moscou et PĂ©kin utilisent des armes technologiquement avancĂ©es pour induire des symptĂŽmes de nausĂ©es, de vertiges, dâacouphĂšnes et de confusion mentale chez les diplomates amĂ©ricains. LâhypothĂšse la plus communĂ©ment admise par les responsables amĂ©ricains est que les symptĂŽmes rĂ©sultent de lâexposition des victimes Ă des ondes radioactives Ă©mises par des armes Ă micro-ondes prĂ©tendument utilisĂ©es par des agents secrets de pays ennemis amĂ©ricains.
De telles affirmations sont bien sĂ»r totalement infondĂ©es. Tout dâabord, il nây a pas suffisamment de preuves pour affirmer quâaucun pays au monde ne dispose dâune telle technologie capable de produire les effets dĂ©crits par les diplomates. Parfois, les accusations amĂ©ricaines sonnaient non seulement comme des mots complotistes, mais vĂ©ritablement futuristes. Donc, avant de prĂ©tendre que tel ou tel pays est impliquĂ© dans ce genre dâactivitĂ©s, il appartiendrait aux Ătats-Unis de prouver que de telles armes existent rĂ©ellement.
Un autre point est le fait quâil est douteux que les diplomates amĂ©ricains stationnĂ©s Ă Cuba et dans dâautres pays en dĂ©veloppement seraient les cibles privilĂ©giĂ©es dâune technologie aussi puissante si un pays disposait rĂ©ellement de ce type dâarmes. NĂ©anmoins, il faut dire que les symptĂŽmes rapportĂ©s par les diplomates sont trĂšs frĂ©quents dans divers types de maladies, notamment liĂ©s au stress et aux situations dangereuses, il est donc prĂ©maturĂ© de dire que les rapports sont des preuves suffisantes pour parler dâun nouveau « syndrĂŽme ».
Ce que nous voyons maintenant nâest pas un rĂ©el changement dans les croyances du gouvernement amĂ©ricain par rapport aux dĂ©clarations prĂ©cĂ©dentes. Au contraire, il sâagit simplement dâune tentative de « confirmer » les thĂ©ories du complot largement rĂ©pandues. Washington ne semble pas intĂ©ressĂ© Ă admettre quâil nây a aucune preuve dâimplication Ă©trangĂšre, mais se sent obligĂ© dâĂ©viter dâĂȘtre accusĂ© dâutiliser une rhĂ©torique complotiste et anti-scientifique, ce qui nuirait Ă lâimage des Ătats-Unis dans la sociĂ©tĂ© internationale. Cela explique la position ambiguĂ« de la CIA : elle admet quâil nây a aucune preuve de lâexistence dâun plan Ă©tranger, mais en mĂȘme temps elle prĂ©tend queque tous les cas nâont pas fait lâobjet dâune enquĂȘte et quâil existe une possibilitĂ© dâimplication Ă©trangĂšre dans certaines situations spĂ©cifiques.
La CIA ouvre simplement la voie aux Ătats-Unis pour prĂ©tendre Ă lâavenir quâils ont trouvĂ© suffisamment de donnĂ©es pour prouver lâexistence dâun plan Ă©tranger. Câest une maniĂšre de « justifier » des thĂšses non fondĂ©es et de leur donner une « validitĂ© scientifique ».
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